Deux périodes précises

1962-1963 et 1966-1967

Récemment, un ami me faisait remarquer que j'écrivais souvent au sujet des années 1960. En relisant mes articles de la section "Souvenirs", je me suis rendu compte qu'il a tout à fait raison. Pourquoi? Sans doute parce que c'est une décennie que je n’ai pas connue et qui a été super prolifique pour la carrière de Nana. Après être devenue célèbre en Grèce et à travers l'Europe, son succès atteignait l'Amérique et les autres continents. Alors, pourquoi ne pas en écrire un autre sur deux périodes précises de cette fabuleuse décennie? Celles de 1962-1963 et de 1966-1967. Chacune vivait son plein sur scène. L'une à Paris et l'autre au Québec.

RAPPEL DES PREMIÈRES ANNÉES

La rencontre de Nana avec le compositeur Manos Hadjidakis en 1958 marque le véritable début de sa carrière. Après avoir remporté le premier prix du Festival de la Chanson hellénique à Athènes en 1959 et en 1960, Nana réussit le même exploit au Festival de la Chanson méditerranéenne à Barcelone. L’année suivante, à Paris, elle enregistre ses premières chansons françaises. Et à Berlin, le film documentaire "Traumland der Sehnsucht" (Grèce, pays de rêve), dans lequel elle interprétait cinq chansons, obtient un Ours d’argent. Grâce à son premier enregistrement en allemand, "Weisse Rosen aus Athen", elle devient millionaire du disque.

1962-1963

À la fin de l’été 1962, Nana met la touche finale à "The Girl from Greece sings", un album de standards américains enregistré à New York sous la supervision du producteur Quincy Jones. Aux États-Unis, elle en est à ses débuts et en Europe, beaucoup de projets l'attendent déjà. C'est pourquoi, elle s'installe à Paris, ville où se trouve son équipe de production. Et, en octobre, elle part pour l'Allemagne afin de présenter la tournée "Treffpunkt der Goldenen" avec les interprètes Gerhard Wendland et Heidi Brühl. 

En décembre 1962, pendant trois semaines, Nana chante en première partie du récital du chansonnier Georges Brassens à l'Olympia de Paris. Il faut dire qu'à ce moment-là, elle n'est pas encore très connue en France. Elle n'est apparue à la télévision qu'à quelques reprises et la presse commence à peine à écrire à son sujet. Par contre, on l'entend à la radio. Sur RTL, ses chansons allemandes et françaises occupent une grande partie de la programmation.

Pour cette première qui la révèle au public parisien, Nana décide de perdre plusieurs kilos et de changer de lunettes. Elle délaisse sa monture papillon pour une carrée. À son avis, "C'est joli la mer" est la chanson qui marque ce passage qui ne dure que 20 minutes. Nana est consciente qu'elle chante devant un public amoureux de la Chanson française, de la chanson à textes. D'ailleurs, au cours des 30 représentations, elle fait connaissance avec quelques grands noms du music-hall.

Au début de 1963, Nana fait ses premiers voyages à Londres afin de réaliser plusieurs enregistrements au studio Marble Arch. En mars, elle représente le Luxembourg à l’Eurovision en chantant "À force de prier", une composition de Raymond Bernard et de Pierre Delanoë. Elle ne remporte pas le concours, mais sa prestation permet aux téléspectateurs de mettre un visage à son nom. Pendant ce temps, Nana poursuit son régime. Au printemps, elle a atteint le poids désiré et se fait couper les cheveux au carré. 

RAPPEL DE TROIS ANNÉES DE TOURNÉES

Suite à son passage à l’Eurovision, son succès grandit dans plusieurs pays de l’Europe occidentale. Après la France, l'Allemagne et l'Angleterre, Nana se rend occasionnellement en Hollande, en Italie et en Espagne afin de présenter ses chansons dans la langue nationale. De 1964 à 1966, elle fait quatre tournées au Canada et aux États-Unis avec le chanteur Harry Belafonte. Cette expérience enrichissante la touche au point de vouloir elle aussi passer la plupart de son temps sur la route pour pouvoir chanter devant son public.

1966-1967

Après une absence de plusieurs mois, les téléspectateurs européens la retrouvent au petit écran en décembre 1966. Nana a les cheveux séparés au milieu et tombant sur ses épaules. Ses montures rectangulaires et plus minces sont celles avec lesquelles on l'associera désormais et deviendront ses lunettes de scène. Les dernières photos publiées remontent au mois de juin, lors de l'enregistrement du show télévisé néerlandais "Caterina Valente Show". À ce moment-là, elle avait changé sa coiffure, mais ses cheveux étaient plus courts. 

Toujours en 1966, à l'automne, l'impresario canadien d'Harry Belafonte, Samuel Gesser, devient son agent. Voyant sa popularité grandir au Quėbec, il décide d'organiser une tournée à travers la province. À son avis, avec ses dix succès francophones et ses chansons grecques, elle a le répertoire qu'il faut pour présenter un tour de chant complet en deux parties.

Ainsi, en janvier et février 1967, avec son ensemble, Les Athéniens, Nana donne 22 récitals au Québec et un à Ottawa. À Montréal, elle a la chance de disposer de la plus grande salle de spectacles de la métropole, la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts avec ses 3 000 fauteuils. Son programme ressemble à celui présenté au cabaret parisien La Tête de l'Art en septembre dernier. Ensuite, Nana se rend au Massachussetts et à New York pour trois concerts. Là-bas, elle chante devant un public majoritairement gréco-américain. Il s'agit de sa toute première tournée solo.

À son retour en France, Nana se rend compte que sa carrière a progressé. Elle est maintenant considérée comme une chanteuse française. Tout d'abord, son album "Le cœur trop tendre" remporte le Grand Prix de l’Académie Charles Cros. Ensuite, "C’est bon la vie" et "Adieu Angelina", deux adaptations américaines deviennent des succès. Nana, qui se retrouve de plus en plus sur scène, délaisse peu à peu les robes foncées. Au cours de la tournée d'été française, on la voit souvent en blanc. Et en octobre, lors de son premier récital en tête d’affiche à l’Olympia, en rouge.

MOMENTS TOUCHANTS ET UNIQUES

Au cours des années 1960, le monde découvrait Nana et sa carrière ne cessait de se développer. De toutes les expériences vécues, chanter devant un public demeure pour elle le moment le plus touchant. Voilà pourquoi j'ai choisi de mettre à la une deux périodes qui l'ont amenée à le faire de façon unique. Que ce soit tous les soirs dans une salle mythique ou dans le cadre d'une tournée, chacune représente une étape importante de son parcours. De plus, est-ce un hasard si celles-ci coïncident avec le changement de son image? Comme j'aurais aimé vivre à cette époque afin d'en être témoin!