Mes plus belles chansons grecques

Recueil 1

PREMIER DE TROIS ALBUMS INTERNATIONAUX EN GREC

Après avoir fait les comptes rendus de plusieurs albums francophones et anglophones, me voilà à la discographie grecque. Pour celle-ci, je choisis ceux qui ont connu une sortie internationale. Comme tous les autres, je les ai écoutés des centaines de fois. Le premier album dont il est question a vu le jour en France en octobre 1963. Sa réalisation était prévue dès l’arrivée de Nana dans la ville lumière deux ans plus tôt. Mais il était tout à fait normal pour sa firme discographique de la faire enregistrer d’abord en français. Son titre varie selon les pays et la langue qu’on y parle. L’original s’intitule "Mes plus belles chansons grecques". Revoyons ici son contenu, ses différentes pochettes et son parcours.

1) LE CONTENU

Comme son titre l’indique, il a fallu faire une sélection avant d’en déterminer le contenu : douze chansons dont huit de Manos Hadjidakis et quatre de Mikis Theodorakis, les deux plus grands compositeurs de l’époque.

Face 1

01- Kathe trello pedi
02- Manoula mou
03- To kyparissaki
04- Hartino to fengaraki
05- Pisso apo tis triandafilies
06- To fengari ine kokkino

Face 2

01- Vassilepses asteri mou
02- Issoun kalos
03- Sto parathiri stekossoun
04- Pou petaxe t’agori mou
05- Kapou iparhi i agapi mou
06- Ta pedia tou Pirea

L’album, produit par Gérard Cote, est le premier auquel André Chapelle a collaboré. Il agissait en tant que technicien du son. L’enregistrement réalisé en stéréo haute fidélité et l’orchestration riche de Jacques Denjean (signée sous le pseudonyme Iakobos Dentjos) nous font redécouvrir ces titres. La plupart de ceux d’Hadjidakis comptent parmi les premiers succès de Nana en Grèce. Citons-en quelques-uns.

"Hartino to fengaraki" (La Lune de papier), sa première chanson écrite par le poète Nikos Gatsos. "Kapou iparhi i agapi mou" (Mon amour est quelque part) qui l’a révélée auprès de ses compatriotes lors du Festival de la Chanson hellénique, tout comme "To kyparissaki" (Le petit cyprès) qu’elle enregistrera dans quatre autres langues. On y retrouve aussi "Ta pedia tou Pirea" (Les enfants du Pirée), la chanson principale du film "Jamais le dimanche". Toutefois, il est étonnant que "San sfirixis tris fores", la version originale de "Weisse Rosen aus Athen" qui l’a consacrée auprès du public allemand, n’y soit pas. Fait intéressant, il y a une chanson inédite : "Manoula mou" (Ma petite maman chérie).

Les quatre premières chansons de la face 2 proviennent de l’œuvre "Epitaphios" mise en musique par Theodorakis sur des textes du poète Yannis Ritsos. Il s’agit de la complainte d’une mère devant son fils assassiné.

Même si ce sont des reprises, trois titres se sont démarqués de cet album : "To fengari ine kokkino" (La lune rousse), "Kathe trello pedi" (Chaque jeune fou) et bien sûr "Ta pedia tou Pirea" (Les enfants du Pirée).

TO FENGARI INE KOKKINO

C’est l’histoire de deux amoureux qui se donnent rendez-vous sur le bord de la rivière lors de la pleine lune. Cette nouvelle version, plus rythmée, met sa voix et les instruments en valeur. En France, ça a été un succès et Nana la chantait dans tous ses tours de chant. D’ailleurs, la chanson est sortie en scopitone (film musical de format 16 mm que l’on pouvait visionner sur l'écran d’un jukebox). Nana apparaît devant une illustration de l’Acropole. Pour marquer le rythme, elle tape des mains et fait quelques pas de danse pour accompagner un couple de danseurs.

KATHE TRELLO PEDI

Sans avoir été l’un de ses premiers grands succès, cette chanson s’est fait remarquer en débutant cet opus. De plus, ses nouveaux arrangements ont sans doute contribué à ce qu’elle devienne un incontournable. D’ailleurs, Nana l’a chantée dans tous ses récitals pendant les années 1960 et 1970 en prenant soin d’expliquer qu’il s’agit d’un jeune insensé enfermé dans sa solitude.

TA PEDIA TOU PIREA

La plus célèbre des chansons grecques a été reprise par les grands interprètes dans toutes les langues. Nana l’a réenregistrée avec les paroles originales qui avaient été composées avec sa voix pendant que Hadjidakis la jouait au piano. Cette nouvelle version se retrouvera dans plusieurs compilations. Et dans ses récitals, on la lui réclame. C’est pourquoi, elle l’offre souvent en rappel. Sur scène comme à la télévision, ça lui est arrivé de la chanter pendant que ses musiciens dansent.

2) LES DIFFÉRENTES POCHETTES

Le microsillon, pressé dans 13 pays, ne compte pas moins de neuf pochettes différentes.

L’ORIGINALE

La pochette originale, parue d’abord en France, est la plus belle pour sa conception graphique. Elle est blanche et deux photos sont assemblées en forme de cercle. À gauche, des bateaux stationnés dans un port. À droite, une photo de Nana en noir et blanc et son nom écrit en alphabet latin et grec. Les titres, en jaune, disposés autour, lui donnent l’apparence d’un soleil. Au verso, il n’y a aucune illustration, que les titres et des textes en français et en grec. Pour le reste de l’Europe, une édition est parue avec les textes écrits en grec, en anglais et an allemand.

ANGLETERRE 

Les Anglais ont été les premiers à connaître cet enregistrement avec une autre pochette. Sur "My favourite Greek Songs", il y a une image de l’Acropole vue depuis la colline de Philopappos et une photo ronde de Nana sans ses lunettes. Au verso, la liste des chansons et les deux mêmes textes en anglais.

HOLLANDE

En Hollande, pour illustrer "Greek Songs", on a utilisé trois photos différentes. Les deux premières éditions sont issues de la série "International stereo". Il y a d’abord celle avec Nana aux cheveux plus courts. La deuxième, sur un fond bleu, avec un gros plan sur son visage à droite. Toutes deux ont un verso identique, avec le détail des enregistrements, un texte biographique et une photo de Nana.

Et la troisième, violette, avec un super gros plan de Nana. Elle porte le titre "Greek Songs by Theodorakis & Hadjidakis". Cette dernière est la plus reprise dans les autres pays. Au verso, rien de plus que la liste des chansons.

AFRIQUE DU SUD 

La firme sud-africaine a utilisé le même titre qu’en Angleterre et le verso est presqu’identique. Toutefois, la couverture est totalement différente avec une photo noir et blanc de Nana de profil.

AUSTRALIE 

Dans les années 1970, les Australiens ont bénéficié d’une nouvelle édition sous étiquette Summit. Sur les deux côtés, la même photo inédite sur fond pâle avec les noms et les titres en rouge et rose.

JAPON

En 1974, à l’occasion de son premier passage au Japon, le 33 tours paraissait avec le titre français et une pochette originale : image de Nana sur une pellicule et la photo d’un port. Au verso, une photo, les titres, un texte en japonais et quatre microsillons recommandés.    

Quatre ans plus tard, l’album était réédité avec une autre pochette. Sur la couverture, le montage d’une photo de Nana devant la ville de Mykonos. Au verso, une vue de l’Acropole avec les titres et un texte en japonais. Pour chacune de ces éditions, il y a un encart avec les paroles.

3) SON PARCOURS

RÉCOMPENSES

Le mois suivant la parution, Nana était convoquée à l’hôtel de ville de Paris afin d’être honorée par l’Académie du Disque français. Son album a obtenu le Grand Prix de Musicologie pour le Folklore. Également récompensés pour leurs enregistrements: Sheila et Claude François. En 1974, il comptait parmi ses 19 albums certifiés or en Australie.

SUPER 45 TOURS

De plus, il a généré un super 45 tours en France "Chante en grec", en Afrique du Sud "Nana’s favourite Greek Songs" et en Yougoslavie "Moje najlepse grcke pesme". Chacun est distinct, avec "To fengari ine kokkino" en tête. En tout, huit des douze chansons sont parues en 45 tours.  

ALBUM TÉMOIN

Aussi, on pourrait le qualifier d’album témoin de ses premières années en France, car il a longtemps été le seul enregistrement disponible de la période 1961-1964. À cette époque-là, on l’aimait surtout pour ses chansons grecques. Il est vrai que personne d’autre que Nana pouvait les chanter aussi bien.

CD

À partir de 1996, l’album est sorti en CD. Tout d’abord, en Grèce, avec une conception graphique différente : sans les rayons de soleil, mais le titre a la forme d’une vague. En 2004, en CD digipack avec huit titres bonus dans son intégrale française. Et, en France, en 2011 et 2014. Sous étiquette Forlane, il s’intitule "Chante la Grèce" et nous propose un montage photo avec l’île de Santorin pour sa couverture. Celui de RDM Édition met en évidence la mention "Grand Prix National du Disque".

RÉENREGISTREMENTS JUSTIFIÉS ET RÉUSSIS

Chaque enregistrement représente un moment d’émotions immortalisé et laisse des traces. Cette sélection de douze chansons a permis au public international de découvrir une œuvre complète de Nana dans sa langue maternelle. Depuis, elle a fait son chemin, nous a fait mieux comprendre ses origines et demeure une référence. Même si on ne connaît pas le grec, il vaut la peine de se laisser charmer par la musique, l’interprétation et la sonorité de la langue. Et avec une acoustique pareille, on peut affirmer sans réserve que ces réenregistrements étaient totalement justifiés et réussis. D’ailleurs, cela ne s’est pas limité à un album et j’ai bien l’intention d’y donner suite dans un prochain article.